Le vaccin à ARN messager (épisode 5 et fin)
Voyons à présent ce qu’est un vaccin. Il en existe un grand nombre de types. Parmi les plus anciens, ceux que Louis Pasteur a mis au point et qui restent d’actualité dans les principes aujourd’hui, même si les technologies de production ont énormément évolué depuis. Le principe est toujours le même : faire en sorte de stimuler le système immunitaire de l’organisme ou plutôt lui faire acquérir une mémoire lui permettant, en cas d’infection par l’agent pathogène ciblé, de produire immédiatement et en quantités suffisantes des anticorps et secondairement stimuler les autres agents du système immunitaire (globules blancs notamment). D’une manière générale, les éléments principaux constituants des vaccins sont des antigènes, comme les virus eux-mêmes ou tout autre élément étranger à l’organisme (toxines, bactéries…). Et ce sont ces antigènes qui déclenchent la production d’anticorps. Ces derniers sont produits avec retard en cas de primo-infection et parfois trop tard ou peuvent dans certains cas ne sont pas produits du tout si l’antigène n’est pas reconnu ou s’il se cache (en partie le cas pour le VIH). En cas de nouvelle infection par le même antigène et à un pas de temps pas trop éloigné (durée très variable), la réaction immunitaire est quasiment immédiate et très importante, permettant l’élimination rapide des antigènes. On constate un phénomène un peu analogue dans certains cas d’allergie (pour faire simple, une réaction immunitaire excessive).
Les vaccins se répartissent en différents types dont voici une liste non exhaustive :
- vaccins à agents infectieux vivants atténués (rendus inoffensifs par mutations forcées). Ceux de Louis Pasteur sont de ce type, mais à l’époque, c’était beaucoup plus aléatoire et risqué ;
- vaccins à agents infectieux inactivés (organismes morts, morceaux d’organismes…). Ce sont ces vaccins qui peuvent contenir le plus d’adjuvants immunologiques qui peuvent correspondre à des motifs moléculaires de l’agent infectieux en renforçant la stimulation du système immunitaire. Parmi ces adjuvants, on rencontre des antibiotiques, des tas de molécules ou des sels d’aluminium. Ces composés ont leur utilité, mais certains peuvent poser des problèmes (allergie, toxicité chez certaines personnes). C’est à bien prendre en compte, on peut s’en méfier, mais ces problèmes éventuels ne devraient pas être de nature à jeter le discrédit général et inconsidéré sur tous les vaccins, à commencer par les vaccins qui ne contiennent pas d’adjuvants problématiques ;
- vaccins à agents antigéniques (molécules portant entièrement ou partiellement un ou plusieurs éléments antigéniques, par exemple une protéine portée par un agent infectieux, une toxine produite par une bactérie…) ;
- vaccins à ARN messager et vaccins à ADN. Leles seconds sont assez proches des premiers, mais semblent plus problématiques et moins sûrs, mais je ne comprends pas bien le mode d’action dans les détails et ils ne sont pas utilisés à ce jour chez l’Homme. Nous allons nous concentrer sur les vaccins à ARN messager.
Le vaccin à ARN messager, contrairement aux autres, ne contient pas d’antigènes en tant que tels, mais de l’ARN messager encapsulé (lipides) lui permettant d’entrer dans les cellules et d’atteindre les usines à protéines. A partir de là, l’ARN messager du vaccin ou celui issu du noyau de la cellule ont exactement le même rôle et suivent le même chemin (cf. vidéo de l’épisode 2). Cependant, pour les vaccins contre le SARS-CoV-2 des deux sociétés Moderna et BioNTech, les ARN messagers ne produisent pas une protéine humaine, mais la protéine du spicule (« spike ») évoquée dans l’épisode 3. La différence avec ce que ferait le virus complet en cas d’infection est que seule cette protéine est produite (celle engendrant le plus de reconnaissance et de réaction immunitaire) et pas les autres protéines, enveloppes, ni bien entendu l’ARN complet du virus). Cet ARN messager vaccinal ne fabrique donc pas de virus et n’entre pas dans les noyaux cellulaires. La protéine « spike » ainsi produite engendre plusieurs types de réactions immunitaires sans provoquer la moindre infection. L’ensemble du système immunitaire est stimulé : globules blancs ordinaires, globules blancs (lymphocytes B – plasmocytes) engendrant la reconnaissance d’antigènes puis la production d’anticorps spécifique, macrophages (cellules digérant les intrus), etc. Les antigènes produits par l’ARN messager vaccinal sont donc éliminés dès la première injection de vaccin. La seconde injection vaccinale renforce le processus.
Personnellement, je trouve cette technologie de vaccin à ARN messager assez extraordinaire et en l’état, présente une efficacité assez extraordinaire, avec des effets toxiques ou allergiques finalement très rares et qui peuvent être a priori traités de manière convenable. Toutefois quelques problèmes se posent encore :
- la durée d’immunisation non établie à ce jour, même si elle semble bien supérieure à six mois ;
- la capacité des vaccinés à véhiculer des virus, non connue à ce jour ;
- l’efficacité du vaccin vis-à-vis de certains mutants (variants). Il semblerait encore efficace contre le mutant dit anglais, mais la question se posent pour d’autres. Je pense que c’est là la principale limite de ce vaccin très spécifique, très ciblé sur une unique protéine. Si la forme de la protéine change suffisamment après mutation, la mémoire humorale (anticorps) risque d’être inopérante ou insuffisamment. A ce titre, des vaccins à plus large spectre (à bas de virus plus complets ou en plusieurs « morceaux ») sont susceptibles d’être plus intéressants à plus long terme. Toutefois, il pourrait aussi être envisageable de produire des vaccins à ARN messagers tenant compte des mutations (ce n’est pas envisagé à ce jour).
En guise de résumé et de synthèse conclusive, je propose cette vidéo que je trouve pas mal, surtout qu’elle reprend une partie des métaphores auxquelles j’avais pensé.