Canalblog
Editer l'article Suivre ce blog Administration + Créer mon blog
Publicité
Cornus rex-populi
Archives
16 avril 2006

RÊVE CATHÉDRAL

Hier après-midi, je suis allé faire une sieste, tant j’avais de la fatigue accumulée à rattraper. Et j’ai rêvé, j’ai fait des amalgames. J’ai même cru un instant que ce rêve représentait une réalité de mon enfance. Alors, je me livre ici à une analyse pour mettre en perspective ce qui est vrai. Assez curieusement, ce rêve avait pour centre la cathédrale Saint-Lazare d’Autun, dont j’ai déjà parlé ici. Le problème est que dans mon enfance, j’ai été largement trompé : une flèche gothique et une voûte en berceau brisé, associées à un certain élan vertical m’avaient invité à conclure glorieusement qu’il s’agissait là d’une cathédrale gothique. Oui, c’est bien cette image là que cette cathédrale véhicule. C’est bien par sa flèche qu’on la repère de loin, qu’on la reconnaît, qu’elle emporte de l’émotion. Mieux, sans elle, l’Autun d’aujourd’hui serait décapité. D’ailleurs, la greffe gothique sur le roman clunisien a très bien pris. Le cardinal Rolin n’était pas forcément une personne particulièrement sympathique, mais il a quand même eu bon goût.

Dans mon rêve, je me revois donc place du Terreau, au pied de la cathédrale, débarquant de la voiture de mes parents. Et là, une bizarrerie me pose un problème : en bas des escaliers, un christ en majesté m’écrase du haut de son tympan. Et là, le caractère roman se met à jurer avec la flèche. Je n’y comprends plus rien. Est-ce bien au pied de la cathédrale que mes parents m’ont débarqué ou dans une nature désincarnée ? Où suis-je ? En ville ? A la campagne ? Je suis ému, mais écrasé par la cathédrale. Où se trouve cette cathédrale ? Va-t-elle m’ensevelir ? Non, elle n’a pas ce genre de pensées funestes. Je n’ai pas peur. Au contraire, je me sens investi d’une rare force. Je ressens un grand plaisir, une sorte d’immense plénitude. Je me réveille alors, sans avoir pu résoudre cette contradiction qui me semble majeure et inconciliable entre le tympan et la flèche de la cathédrale. Pourquoi un tel sentiment ? Je ne sais pas trop. Je me trompe sûrement, mais j’attribuerais bien la « contradiction inconciliable » à la frustration (pourtant toute relative) que j’ai par rapport à mon inculture (sans doute elle aussi relative, du moins je l’espère) des arts romans et gothiques. Ensuite, si je poursuis l’interprétation psychanalytique bas de gamme (pléonasme ?) de mon rêve, à quoi peut-on attribuer ce plaisir, cette plénitude ? Eh bien moi, je l’attribue à la chance que j’ai. D’abord, l’amour et la bienveillance de ma famille, une très grande chance et quelque chose de fondamental dans ma vie. Ensuite, une autre bienveillance de nouveaux amis, qui eux, ne font pas semblant de s’y connaître en architecture médiévale. Enfin et surtout, l’amour d’une femme (S.) qui n’est pas pour rien dans la sérénité affichée. C’est grâce à elle que je suis en mesure de me décontracter : aimer sans me poser de question, aimer sans avoir à me justifier.

Et puis, peut-être est-ce là le nœud du problème, et pourtant je sais que c’est un sentiment vain : inconsciemment, je crains peut-être le verdict de S. quand elle aura découvert, pas seulement la cathédrale, mais certains de mes jardins secrets. Il ne faudrait pas que ma chère et tendre (au moins) S. s’imagine que je tente de façon inconvenante, à lui faire porter une quelconque responsabilité. Je l’aime, et je ne doute pas que nous saurons construire ensemble de nouvelles découvertes ou redécouvertes.

Publicité
Publicité
Commentaires
K
oui ce blog de plus en plus me fait l'effet d'un monde parallèle qui a ses lois et ses vérités propres, en relation avec la vraie vie certes, mais avec d'autres perspectives, comme ces rêves toujours énigmatiques. Lire d'un autre le récit d'un rêve cathédral m'est chose étrange, combien de fois ces nefs habitèrent mes propres songes? Se peut-il qu'elles s'invitent dans d'autres imaginaires que le mien? Le jardin secret, la conciliation de deux vies... voilà un sujet d'aprentissage... j'ai cet avantage, malgré les bouleversements de ma vie, d'avoir cette expérience de la vie à deux, mais on bâtit pas un couple à 24 ans comme à 35 ou 40. A 24, dans le meilleur des cas - qui fut le mien je pense - on construit presque une cathédrale ex nihilo, on s'arqueboute l'un sur l'autre, c'est un équilibre dynamique, comme celui, unique dans l'histoire de l'architecture ancienne, de l'art ogival. A 35 ou 40 les fondations préexistent au nouvel édifice, contraignent le plan et les desseins de l'architecte, parfois même ils doivent conserver des pans entiers de l'ancien édifice. Chartres en est le plus célèbre exemple. Shakespeare lui même, me dit-on, écrivait en obeïssant à un sévère cahier des charges. De grandes choses ont été faite dans l'obervance d'indélogeables contraintes. Voilà donc un autre rêve cathédral, pour l'avenir. Tes interrogations sont naturelles, ce qui t'arrive, et je l'ai maintes fois dit à mon propre sujet, t'implique dans la vie plus que jamais. Qui ne se pose pas de questions devant un tel engagement?
Répondre
B
Tu n'avais pas à te justifier... :-)
Répondre
K
Décidément les pierres sacrées amènent le rêve...
Répondre
C
Tout d'abord, merci pour cette visite et ce petit commentaire.<br /> Je ne me suis sans doute pas encore suffisamment exprimé sur mes "blogs" pour en tirer des traits de caractère. Encore que ?...<br /> Pour dire vrai, le débat houleux auquel tu fais allusion ne m'a pas laissé totalement de marbre, mais voilà, je vais bien. J'aurais voulu t'envoyer un courriel personnel pour me "justifier", mais je n'avais pas trouvé l'adresse.<br /> Quant à l’amour, cette une histoire qui est encore relativement récente avec S., mais promise – tout permet de le croire – à un bel avenir.
Répondre
B
Bon sang ! Pourquoi j'ai mis un D à ressent ???
Répondre
B
Et vive les oiseaux migrateurs... (on va pouvoir chasser en meute sur Canalblog maintenant).<br /> <br /> J'espère que le débat houleux chez moi n'a pas gâché cette belle sérénité, qui se ressend dans tes deux blogs, d'ailleurs.<br /> <br /> Un amour inconditionnel et sans jalousies, sans cachotteries, je connais aussi. Je croise les doigts pour que ça continue tous les jours, d'autant que le reste va bien aussi (santé, famille, choix de vie, etc). Pourtant, même avec tout cela, dire que je suis serain... Je ne pense pas. Je pense que la sérénité, c'est en soi, c'est un caractère que l'on a ou pas...
Répondre
Cornus rex-populi
Publicité
Derniers commentaires
Publicité