Histoires de lits
Cet article ne vise pas à l’exhaustivité, tant il y aurait pourtant à dire.
Il me semble avoir déjà évoqué cette première anecdote. En septembre 1999, je décide de partir quelques jours pour faire des relevés phy*to*sociologiques sur les bords de la Loire, à une vingtaine de kilomètres en aval d’Orléans. Afin de réaliser des relevés sur un îlot et les grèves associées, je franchis un riot (un petit bras de 3 m de large que je qualifierais d’au moins de tertiaire), dans lequel la profondeur n’excède pas 15 cm. Au retour, je franchis le riot, une dizaine de mètres plus en amont qu’à l’aller. Pas de souci, ce n’est pas profond du tout, mais là, gloups, je m’enfonce jusqu’à la ceinture. Je finis par me sortir des sables mouvants vaseux, à vrai dire assez facilement. J’en profite pour dire que les bancs de sable de la Loire moyenne sont beaucoup plus stables et moins mouvants qu’on ne le dit trop souvent. Je ne veux pas dire qu’il n’y a aucun danger, mais pour qui sait « sentir » un peu les choses, les risques sont tout de même bien limités. En revanche, ce qui peut être coton voire dangereux, c’est de vouloir grimper, dans le sens du courant, sur un front de grève, car le sable (ou le fin gravier) y est en perpétuel mouvement et n’assure aucune forme de stabilité et de cohésion (on pédale dans la semoule).
Mais le but n’était pas là de raconter le lit de la Loire, mon ancienne amante de sable et d’eau, mais de vous conter la suite après mon magnifique « gaugeage ». N’ayant, par amateurisme, emporté qu’un seul pantalon pour ma petite expédition et voulant cependant être présentable le soir à l’hôtel et surtout à mon rendez-vous du lendemain en Loire nivernaise, je décide d’aller acheter un pantalon dans le supermarché le plus proche. Je m’habille pour cela d’un magnifique pantalon de style k-way de couleur kaki. Une fois l’achat effectué, ayant déjà perdu beaucoup de temps, je me mets en quête d’un hôtel. Le premier affiche complet. Idem dans un établissement de la commune voisine, dans lequel les employés me disent que tous les hôtels sont complets à Orléans et aux environs en raison du congrès national des pompiers qui a lieu à Orléans. Alors au sud ouest d’Orléans, je décide de passer en Sologne, au sud. Mais là aussi, c’est complet à La Ferté-Saint-Aubin, chez les sœurs Tatin de Lamotte-Beuvron… Je décide alors de m’enfoncer dans la Sologne profonde, plus au sud et plus à l’est. La nuit commence à tomber et c’est du côté d’Aubigny-sur-Nère (plus très sûr que cela soit dans cette commune, mais en tout cas, ce n’est pas loin), que je trouve une chambre dans un hôtel du centre-village, dans une maison dont les souvenirs m’indiquent qu’elle était à pans de bois. Ma chambre trônait au second étage, au bout d’un escalier de bois tortueux. Les murs étaient bleu turquoise pisseux à la mode des années 1950 sur lesquels je vis ensuite de magnifiques écailles « croûte-lève » plâtreuses blanches. Et surtout le lit, très confortable, du style dont le sommier à ressorts à boudins s’enfonce d’au moins 20 cm quand on se couche dessus et dont le très épais matelas permet de compter très exactement le nombre qui viennent chatouiller les côtes, parce qu’il est bien entendu impossible de dormir dans de telles conditions (et je ne parle pas des grincements). Bref, un hôtel infréquentable.
Ma deuxième anecdote n’est pas vraiment nouvelle non plus. Elle remonte au matin de notre premier mariage en août 2006. J’avais installé le lit quelques jours plus tôt : bois de lit, sommier à lattes retenu aux quatre angles et deux pieds télescopiques en pastique, au centre. J’avais trouvé ces pieds un peu bizarres, mais après tout, le plastique, ça peut être solide. A vrai dire, il existe aussi des bois de lit équipés de traverses qui rendent de tels pieds superfétatoires. Mais là, point de traverses. Nous avons bien dormi toute la nuit, mais le lendemain matin, en plein exercice physique pour tester la solidité du lit (oui oui) et avec nos poids plume, nous nous sommes retrouvés effondrés au milieu. Une première réparation de fortune a consisté à placer une caisse dessous dont la hauteur correspondait exactement. La seconde réparation a consisté à doter le sommier de pieds maison sur mesure, avec de très grosses tiges filetées. De l’indestructible. Je me souviens de l’étonnement des déménageurs en 2008 en voyant mon montage. Le bois de lit, comme les autres meubles achetés à l’occasion, avaient été marchandés chez Con*for*ama. Ce n’était pas le plus bas de gamme, mais pas du haut de gamme non plus, on peut s’en douter. Et bien que le style nous plût, il possédait, en plus de l’absence de traverses, deux autres défauts liés. Au pied du lit, une bordure comprimait le matelas (quand il était neuf) et à la tête, le même type de bordure saillante a rencontré nos têtes à plusieurs reprises.
Fin septembre, constatant déjà de longue date un certain affaissement du matelas, nous décidons d’aller voir dans un magasin spécialisé à H. Là, le patron nous fait essayer une demi-douzaine de matelas, presque tous à ressorts (il y a d’excellents matelas à ressorts modernes). De retour à la maison, je suis inquiet à cause de la grande épaisseur de ces matelas. Celui que nous préférons fait 27 cm et il y a encore plus épais. Cela ne convient pas à notre bois de lit, même en abaissant au maximum le support de sommier. Et puis je constate que les lattes ne sont pas toutes au milieu de leur forme côté bandage. La semaine suivante, nous décidons d’aller dans la commune voisine où se trouve un autre magasin qui, renseignements pris, fabrique sur place matelas et sommiers, et même, nous l’apprendrons plus tard des bois de lit. Nous pensions que ce fabricant artisanal était hors de prix. Ce n’est évidemment pas du premier prix, mais tout bien pesé, c’était bien moins cher que nous l’imaginions au départ. Du coup, nous nous sommes payé le luxe de tout changer, selon nos goûts. Il paraît que les montants de lit au pied sont largement passés de mode, mais nous, on préfère en avoir un, alors nous l’avons eu. Nous avons été livrés mi-novembre. L’avant-veille, je démonte, seul, l’ensemble de l’ancien lit. Après avoir retiré le matelas, dans le peu d’espace qui s’offre à moi, me voilà déséquilibré et je tombe sur le sommier, passant royalement à travers, plusieurs lattes déboitées et une cassée et le matelas en profitant pour me choir dessus. J’appelle Fromfrom, je lui crie de me venir en aide. Un instant paniquée, elle finit par éclater de rire en me voyant en fâcheuse posture, parce que je n’ai bien sûr pas eu la moindre blessure dans la chute. Voilà ce que donne le nouveau lit.